En avril 2022, un rassemblement citoyen et une coordination d’élus inter-régionaux ont déposé deux recours distincts pour demander l’annulation du plan de financement du Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO). Le premier, d’initiative citoyenne, rassemble 70 particuliers et une centaine d’associations (fédérations départementales de la Sepanso, Trans’cub, Coordination vigilance LGV 33…) de Nouvelle-Aquitaine et d’Occitanie. Le second provient de la coordination de 80 élus des groupes politiques régionaux en opposition avec le projet de nouvelles lignes à grande vitesse.

Les deux recours, déposés via des procédures distinctes, dénoncent le niveau de participation des collectivités locales, jugé trop élevé, et le risque relatif au surcoût global du projet.

En effet, le plan de financement détaillé prévoit déjà des dépassements. En particulier, il est écrit en page 9 que “les autres frais, comme les frais financiers et les frais de gestion liés à la mise en place de l’EPL [Établissement public local], à qui il appartiendra de définir sa stratégie financière, ne sont pas pris en compte dans ces coûts et devront, le cas échéant, être portés par les collectivités locales seules. […] en visant, par exemple, l’étalement de la charge budgétaire sur 40 ans, les frais financiers pourraient atteindre 10% des coûts d’investissement.”

De plus, ce plan de financement embarque les collectivités locales « volontaires » dans un financement des LGV avec une forte probabilité qu’elles soient solidairement contraintes de financer les aléas et dépassements budgétaire de la construction, si ce n’est, à terme la maintenance d’une infrastructure vouée à un déficit d’exploitation.

Ces écueils n’ont pas été pleinement considérés par les collectivités incitées à prendre une part au projet, le plan de financement ayant été conclu à la hâte fin 2021 lors de la relance du projet après 4 ans de “mise à l’arrêt” suite aux annonces gouvernementales de 2017 (à l’époque Élisabeth Borne ministre des Transports annonce vouloir prendre le temps de réfléchir). Jean Castex a ainsi signé mi mars 2022 les décrets d’application de l’Établissement Public Local (EPL), sans garantie de financement de l’Union Européenne attendue à 20% du budget total du GPSO (près de 3 milliards d’euros en 2022), et malgré le refus de financement de certains départements tels que le Lot-et-Garonne. La région Nouvelle-Aquitaine a donc avancé les sommes manquantes dans le tour de table régional, soit 225 millions d’euros, que l’État s’est engagé à rembourser.

Gilles Savary expose les implications de ce montage dans une tribune publiée en 2023 : “les collectivités locales contributives sont regroupées pour 40 ans dans un établissement public financier, chargé de souscrire leur part de financements sur les marchés financiers au taux du marché. […] Cette structure n’aura pas la compétence de maitre d’ouvrage du chantier, dont les travaux seront réalisés sous la maitrise d’ouvrage de SNCF réseau. Il s’agit donc essentiellement d’un outil de débudgétisation et de mutualisation de la contribution des collectivités
locales, qui échappera à tout contrôle direct des assemblées locales.”

Article :

  • La Société de projet du GPSO : un cheval de Troie institutitonnel pour piéger les finances locales dans le financement des TGV. Gilles Savary et Marc Ivaldi. Février 2023. Tribune (7 pages) à lire en ligne.
  • “GPSO, Pourquoi les recours ciblent les surcouts des LGV vers Toulouse et Dax”, La Tribune, avril 2022. À lire en ligne.
  • GPSO, la Nouvelle-Aquitaine avancera 225 millions d’euros pour boucler le budget de la LGV“, La Tribune, février 2024. À lire en ligne.

 

NB : tableaux récapitulatifs produits par Patrick Viccari, président de l’association TGV en Albret.