Au sommaire :
- Un financement reposant sur trois acteurs
- Un montage par Société de Grand Projet
- Un financement bancal à plusieurs égards
UN FINANCEMENT REPOSANT SUR TROIS ACTEURS
Les trois acteurs officiels
Le financement du projet repose sur trois types d’acteurs principaux pour boucler un budget total de 14,3 milliards d’euros (non actualisé depuis l’inflation de 2022) :
- 40% les collectivités
- 20% l’Union Européenne
- 40% l’État
Télécharger le plan de financement officiel.
Concernant en particulier le premier volet de ce plan de financement, par les collectivités
Les régions Nouvelle Aquitaine et Occitanie, les métropoles de Bordeaux et Toulouse, et 14 Départements, ont ainsi 5,6 milliards d’euros à leur charge. Ces collectivités en payent une partie (49 millions d’euros par an) directement sous forme de subvention, le reste en prélevant sur le contribuable une Taxe Spéciale d’Équipement (ou TSE, renommée “Impôt LGV” dans les médias), correspondant à 24 M€ par an, prélevés sur 40 ans dans 2340 communes*. Cette TSE a été mise en place par la loi finance 2022 et amendée en 2023, ce dont se félicite alors le Ministère des transports.
*La liste de ces communes est parue au Journal Officiel de janvier 2023 et est accessible ici sur legifrance.
Pour la Nouvelle Aquitaine, un tableau récapitulatif des collectivités finançant (ou pas) le projet a été diffusé lors de la plénière du conseil régional de Nouvelle Aquitaine de février 2022, dans laquelle Alain Rousset annonce la relance du GPSO à la demande du Premier Ministre de l’époque, Jean Castex.
Revue de presse de cet “impôt LGV”
- Sud Ouest, janvier 2023 “Impôt LGV Bordeaux-Toulouse-Dax : comment fonctionne la taxe spéciale d’équipement”
- Actu Nouvelle Aquitaine, janvier 2023, “Taxe LGV : “Le Conseil départemental a évité la double peine aux Lot-et-Garonnais”
- Actu Occitanie, janvier 2023 ” LGV Bordeaux-Toulouse. Voici la liste des communes du Sud-Ouest visées par le nouvel impôt LGV”
- Sud Ouest, janvier 2023, “Carte. Future LGV Bordeaux – Toulouse : découvrez la liste des 2 340 communes soumises à une nouvelle taxe”
- Sud Ouest, janvier 2023 “Carte interactive. Taxe LGV Bordeaux-Toulouse : la quasi-totalité des Girondins devront la payer”
📍 Le collectif StopLGV47 a ainsi crée une carte interactive permettant de visibiliser cette taxe : LIEN
UN MONTAGE PAR SOCIETE DE GRAND PROJET
Le montage associé à la partie du plan de financement relevant des collectivités
Précisions concernant la gouvernance de la SGPSO (Societe du Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest)
- Le comité de surveillance est composé de représentants élus des collectivités ou groupements de collectivités signataires du plan de financement du 18 février 2022, d’un représentant de l’Etat (Préfet de Région Occitanie), d’un représentant de la Commission européenne, un représentant de SNCF Réseau, un représentant de SNCF Gares & connexions.
- Le Conseil de surveillance assure le contrôle permanent de la gestion de l’EPL. Il se réunit au moins une fois par semestre. Par ailleurs, au sein de l’EPL, il instaure deux commissions, l’une consacrée à l’ingénierie financière, l’autre aux contrats.
- Le directoire, sous contrôle du conseil de surveillance, agit au nom de l’établissement public local comme ordonnateur principal des dépenses et recettes, établit le budget, assure la soutenabilité de l’emprunt au regard des ressources de l’EPL. Il recrute et gère le personnel.
- Le directoire comprend trois membres nommés par le conseil de surveillance, et l’un de ces membres peut notamment être en charge de la direction générale de l’établissement public « Société de la Ligne Nouvelle Montpellier-Perpignan ».
Comite de pilotage
Par ailleurs, la SGPSO participe à une instance dénommée « comité de pilotage » associant les personnes morales qui financent le Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest. La composition de ce comité, ses missions et son fonctionnement sont précisées dans le décret en Conseil d’Etat du 22 avril 2022.
En effet, à la différence de la Société du Canal Seine Nord Europe, qui est maître d’ouvrage et donc responsable de la construction de l’infrastructure, la Société du GPSO, dans la situation actuelle, n’est qu’une des parties prenantes du projet, chargée de contribuer à son financement. C’est en fait le Comité de pilotage, co-présidé par le Préfet de la région Occitanie, le Président du Conseil Régional Occitanie et le Président du Conseil Régional Nouvelle Aquitaine qui garantira « la capacité d’action des maîtres d’ouvrage (SNCF Réseau et SNCF Gares et Connexions) à la conduite du projet dans les conditions de coûts et de délais prévus par les parties prenantes ». NB : SNCF Réseau qui peine à assumer son plan de charge de rénovation du réseau ferroviaire français a par la loi interdiction de financer des lignes nouvelles.
Les noms derrière cette gouvernance
Cette structuration et la nomination des personnes siégeant aux différentes instances de la SGPSO s’est opéré en 2022 et 2023 :
- Étienne Guyot, Préfet de la région Occitanie et préfet coordonnateur du GPSO, a installé le 4 juillet le conseil de surveillance de la société du GPSO, réunissant les 25 collectivités territoriales finançant le projet, ainsi que SNCF Réseau et SNCF Gares et Connexions.
- Carole Delga, présidente de la région Occitanie / Pyrénées-Méditerranée a été élue présidente du conseil de surveillance. Georges Méric, président du conseil départemental de Haute Garonne et Alain Anziani, président de Bordeaux Métropole ont été élus vice-présidents.
- Guy Kauffman est élu président du directoire la société de projet (SGPSO)
- Le comité de pilotage a par la suite nommé six vice-présidents territoriaux : Jean Dionis du Séjour, Xavier Fortinon, Jean-Luc Moudenc, Alain Anziani, Michel Weill, Brigitte Barèges, Jacques Oberti, Charles Dayot.



Les décisions prises par ces conseils : signature de convention de financement et d’investissement
- Le premier conseil de surveillance de juillet 2022 a acté une convention de financement prévoyant le versement par les collectivités à partir de 2023 de leur part au projet à raison de 1/40e chaque année pendant 40 ans, afin de permettre les levées de fonds nécessaire à la société du GPSO.
- Un second conseil de surveillance en octobre 2022 a approuvé les trois conventions financières qui seront signées entre l’État, l’agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), la société du GPSO, SNCF Réseau et SNCF Gares et Connexions pour un montant total de 67,474 millions d’euros.
- Ces conventions permettront de démarrer :
- les phases pré-opérationnelles du projet avec 58 M€ pour les lignes nouvelles Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax afin de poursuivre les études d’avant-projet détaillé et l’action foncière ;
- les études préliminaires des gares nouvelles pour 3,974 M€ ;
- une première tranche de travaux préparatoires et d’acquisitions foncières du projet des aménagements ferroviaires au nord de Toulouse à hauteur de 5,5M€.
Un fil twitter permet de suivre la structuration et les décisions prises par ces instances.


Plus d’informations sur la SGPSO (Société du Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest) :
UN FINANCEMENT BANCAL À PLUSIEURS ÉGARDS
Les principaux éléments à charge
- Les retards et aléas systématiques qui conduisent à d’important surcoûts, ce que l’on peut constater par exemple sur le projet du Grand Paris Express, emblématiques des grands projets (voir ici et là) ;
- Le déficit structurel des lignes à grandes vitesse dont a fait part la Cour des Comptes dans son rapport de 2014 : Cour des comptes 2014 : Grande vitesse ferroviaire, un modèle porté au-delà de sa pertinence.
Les autres acteurs du financement, l’État et l’Union Européenne, tout aussi incertains
L’État, d’une part, a une facheuse tendance à se désengager de ses propres plans de financement en faisant appel au privé pour pallier à ses mauvais d’investissements. C’est le cas pour la LGV Tours-Bordeaux pour laquelle l’État a conclu un partenariat public-privé qui a été catastrophique : voir par exemple cet article ou celui-ci. Ce PPP est pourtant connu comme un modèle promu avant tout par les entreprises privées tirant un profit maximal des grands projets au détriment de l’intérêt public : voir le rapport de Yves Crozet. Dans la course à la privatisation caractéristique de nos gouvernements actuels, l’État sera-t-il encore tenté de s’en remettre au privé en cas d’impasse ?
L’Union Européenne, d’autre part, a décliné le financement du GPSO dans le cadre du mécanisme d’interconnexion européen MIE* de 2022 >> voir le tweet de Karima Delli, présidente de la commission transport de l’UE.
*Le MIE est l’instrument de financement de l’UE pour les investissements stratégiques de transport en Europe.
Mais dès le début de 2023, SNCF Réseau a déposé deux dossiers de financement pour un montant de 200 millions, dont près de 60 sont désormais attribués par l’Europe.
Le principal problème, du point de vue de l’Europe, étant que le GPSO ne permet pas la liaison jusqu’en Espagne : il s’arrête à Dax. Celle-ci peut douter que ce projet rentre dans le cadre de ses projections de croissance économique des pays européens par la multiplication des échanges et des connexions de grandes métropoles entre elles, malgré ce que tente de démontrer le rapport d’enquête publique en 2015, pour lui faire plaisir :
La seule question qui se pose en ce qui nous concerne étant surtout : qui va payer les 20% restant, si l’UE ne les finance pas?

